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Chapitre 4 La conscience expliquée ?

Psychologie et conscience

Chapitre 4 : La conscience expliquée ?

Nous avons abordé dans les chapitres précédents les théories neurologiques et psychologiques cognitives sur la conscience. Dans ce chapitre, nous allons nous intéresser aux tentatives d’explications faites par les philosophes. L’une des raisons est qu’aucune des théories que nous avons exposées jusqu’à présent n’explique l’intuition suivante : la conscience implique quelque chose comme un sentiment diffus, une émotion ou une expérience, ou comme le dirait Nagel, quelque chose qui serait comme être conscient. En fait, nous aurions pu étudier beaucoup d’autres propositions sur la conscience, mais cette intuition resterait une pierre d’achoppement. Pourquoi ?

1. Le “problème dur” de la conscience

Chalmers (1995, 1996) suggère qu’expliquer la conscience présente un certain nombre de difficultés, mais que l’une des plus grandes est d’expliquer comment l’expérience (feeling ou conscience phénoménale) surgit à partir d’une base physique. Ceci est connu comme le problème des qualia, un terme utilisé pour décrire les ressentis ou expériences individuels. Par exemple : à quoi ressemble le fait de boire une tasse de café ?

Searle (1999) identifie trois caractéristiques des états conscients : ils sont intériorisés, qualitatifs, et subjectifs. Ce caractère subjectif pose problème : nous ne pouvons pas objectivement observer ce que cela fait d’être dans un état conscient. Le fait même que les états conscients soient qualitatifs (ils impliquent un ressenti) rend difficile leur observation externe. Enfin, leur subjectivité renforce la difficulté d’en proposer une explication objective et scientifique.

Nagel (1974) parle du caractère à la “première personne” de la conscience : il y a toujours un « je » qui fait l’expérience. Cela implique un point de vue particulier, ce qui rend difficile de concevoir une théorie objective. Par exemple, une chauve-souris perçoit le monde à travers un sonar — nous ne pourrons jamais vraiment comprendre ce que cela fait d’être une chauve-souris.

2. La conscience phénoménale existe-t-elle vraiment ?

La position de Dennett

Daniel Dennett (1991) adopte une position radicalement différente. Selon lui, la conscience phénoménale n’existe pas. Il propose que l’esprit est une série de processeurs spécialisés fonctionnant en parallèle. Bien que cela ressemble à la théorie de Baars, Dennett nie l’existence même du feeling. Selon lui, le langage peut nous induire en erreur : nous croyons qu’il existe une expérience interne qualitative, alors qu’il ne s’agit que d’une illusion conceptuelle.

L’expérience de pensée de Jackson

L’expérience de pensée de Franck Jackson (1982) cherche à prouver le contraire. Il imagine Marie, une scientifique qui connaît tout sur les couleurs, mais qui vit dans un monde en noir et blanc. Quand elle voit la couleur rouge pour la première fois, apprend-elle quelque chose de nouveau ? Beaucoup pensent que oui : elle apprend ce que cela fait de voir le rouge. Cela démontre, selon Jackson, qu’il existe un aspect de l’expérience qui échappe à l’explication physique. Pour Dennett, en revanche, cette expérience est faussée, car il est impossible de concevoir ce que serait une connaissance parfaite de la physique des couleurs.

3. La conscience comme propriété fondamentale ?

La position de Chalmers

Chalmers propose que l’expérience consciente soit un trait fondamental de l’univers, comme la masse ou la charge électrique. Il propose l’expérience du zombie : un clone humain identique moléculairement, mais sans conscience. Est-ce concevable ? Si oui, cela signifie que la conscience ne découle pas automatiquement de la structure physique. Cela suggère qu’il y a quelque chose de plus à l’expérience.

Cas réels comme exemples

Des cas comme celui de Ken Parkes (qui commit un meurtre en somnambule) ou de la vision aveugle (patients capables de percevoir sans en être conscients) renforcent cette hypothèse : ces individus agissent comme s’ils étaient conscients, mais sans l’être subjectivement. Cela suggère que la conscience ne résulte pas seulement de l’activité cérébrale.

Critiques de Chalmers

Sa théorie soulève toutefois des objections. Comment des objets non conscients (neurones, chaises) peuvent-ils produire une conscience ? Et que signifie vraiment le fait que l’expérience est un trait fondamental ? Ces idées restent floues et controversées.

4. Le mystérianisme : une explication impossible ?

Colin McGinn soutient que la conscience dépasse nos capacités cognitives. Comme les animaux ne peuvent comprendre certaines réalités, nous ne serions pas capables de comprendre la nôtre. Selon cette approche, la conscience ne pourra jamais être expliquée scientifiquement.

5. Conclusion : vers une nouvelle conceptualisation ?

Les approches cognitives, biologiques et philosophiques montrent l’ampleur du défi. Tandis que l’accès à la conscience, la fonction de contrôle et la conscience de soi peuvent être décrites par les sciences, la conscience phénoménale semble échapper à toute explication.

D’un côté, on peut nier son existence (position de Dennett) en l’attribuant à une erreur conceptuelle. De l’autre, on peut l’admettre mais reconnaître qu’elle excède les explications scientifiques actuelles (Chalmers, McGinn).

Quoi qu’il en soit, la recherche sur la conscience reste ouverte. Elle exige des perspectives pluridisciplinaires, une remise en question de nos modèles théoriques, et peut-être une nouvelle façon de penser la relation entre l’esprit et la matière.

 

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