Encore un nouveau courant venu des États-Unis cette fois-ci dans le domaine du management des organisations. Un nouveau courant et qui pourtant repose sur des principes connus depuis des millénaires et sur une question : Comment réconcilier intuition et rationalité ?
Comment prendre des décisions prospectives en privilégiant la méditation et non l’action ?
Il est étonnant qu’il ait fallu tant de temps pour que l’intuition soit reconnue comme outil de management et alors que jusqu’à récemment la rationalité nous demandait de nous en méfier. C’est pourtant ce que fait la théorie U d écrite par Otto Scharmer .
Ce livre nous parle d’émergence du futur, de visions émergeant d’une écoute de leur voix intérieure par des dirigeants d’organisation, d’une libération de la créativité par le seul fait d’être présent à soi-même.
Quelles sont, très résumées les grandes lignes, de la théorie ?
Deux schémas de prise de décision coexistent :
L’un, qui nous est habituellement enseigné dans nos universités comme étant les clés du succès, le vade-mecum du bon manger, un management basé sur l’observation et la modélisation d’expériences passées, qui peut se résumer ainsi : j’agis, j’observe, je réfléchis, je planifie, j’agis.
L’autre qui s’appuie sur l’écoute du futur tel qu’il émerge ; pour le dire de façon plus simple, j’écoute, j’agis. Et l’écoute anticipe l’action, ce qui représente une vraie révolution managériale !
Tout cela repose sur une définition du management, qui se traduirait par la gestion du changement.
Et, pour Otto Scharmer, il y aurait quatre niveaux de réponse au changement :Le premier consiste à répondre à une situation nouvelle par une action rapide et immédiate. Le second consiste à reformuler les règles, à ré analyser les process et les structures. Le troisième niveau devient plus sophistiqué et plus immatériel : les valeurs et croyances sont remises en cause ou réévaluées au vu de l’évolution de l’organisation et de son environnement. Mais il y a un quatrième niveau qui consiste à retrouver les sources d’énergie primordiale et à s’y « re-brancher » avant que le souffle ne s’éteigne pour retrouver ou garder ce qui a fait le succès de l’organisation à un moment.
Car, le développement de toute structure, ou produit de structure, comme tout ce qui est vivant suit une courbe de Gauss c’est-à-dire naît, croit vit et meurt sauf à trouver à temps la nouvelle idée qui permettra de rebondir, cette idée, cette source d’inspiration qui est non dans la tête d’un dirigeant aussi brillant soit-il mais… dans l’air du temps et donc de nature collective tel un égrégore dont il faudrait prendre conscience.
Et répondre au changement à ce niveau consiste à retrouver ces sources d’énergie, de motivation et d’inspiration qui ont fait le succès de l’organisation.
Comment ? En rentrant en nous-mêmes, en écoutant notre voix intérieure qu’on appelle soit intuition, soit inspiration, ce qu’Otto Scharmer appelle le « trou noir du leadership », car comme dans la galaxie, on ne sait pas très bien comment cela se passe car on ne peut pas l’observer et pourtant cela représente une source d’énergie considérable car nous atteignons la source même de l’information créatrice. Et celle-ci s’inscrit en nous.
Et c’est en ce sens que cette théorie s’inscrit dans les approches quantiques des sciences telles qu’elles ont été décrites par Erwin Laszlo , philosophe des sciences, dont les observations sur les dernières découvertes scientifiques ré-enchantent un univers désenchanté par la science, :« aux racines de la réalité, ne se trouvent pas uniquement la matière et l’énergie, mais aussi un facteur plus subtil et tout aussi fondamental que l’on pourrait décrire comme une information active et puissante, soit l’in-formation ».
La lettre U symbolise ce nouveau système de management.
D’abord, la première branche du U, descendante, nous demande d’observer encore et encore ; la base du U nous conseille de rentrer en nous-mêmes puis nous remontons le long de la troisième branche en agissant rapidement.
Otto Scharmer donne les détails de ce processus dans lequel il serait trop long de rentrer ici. Mais il apport de nombreux témoignages sur le succès de cette approche dans divers organisations publiques ou privées.
Une approche basée sur l’écoute des autres et de soi-même, sur l’ouverture de l’intelligence, du cœur et du désir et sur l’expression décomplexée de ce que l’on ressent. Ce livre traduit une profonde évolution sociétale qui passe d’un management basé sur des valeurs « viriles » à des valeurs plus « féminines », de l’animus à l’anima, de l’action à l’intuition.
L’apport de cette théorie est de nous autoriser l’accès à d’autres champs de conscience dans un secteur celui du management où jusque-là, les intuitions devaient se justifier par des études de marché, celui du pouvoir avec toutes les dérives connues. Cette théorie a été élaborée à partir de « success stories » et donc fonctionne Elle remet en cause les systèmes hiérarchiques pour aller vers des systèmes collaboratifs ; mais cela suppose bien sûr acceptation et liberté, pour soi et pour l’autre.